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  • barbaradelaroche

Maminute.com/« Halloween, jamais tu ne me fis peur ! L’eusses-tu su ? »

Dernière mise à jour : 31 oct. 2022


Non tu ne me fais pas peur. En ce crépuscule de mois d’octobre, tes toiles d’araignées et tes citrouilles même évidées, édentées et éclairées de bougies, non plus. Même ton excuse cette année de la sobriété énergétique pour éteindre l'éclairage public, avec les maires et leur budget squelettique pour être au rendez-vous d’une fête outre Atlantique, ne m'angoissent plus. Non ce qui m’effraie, c’est cette information : on veut tuer le Passé simple !

Ce n’est pas une fiction ni une fake News. Une réalité flippante et vraie, étouffée et noyée au milieu de l’orange de l’automne et de son acolyte désormais européanisé, Halloween, le 31 octobre. Pourtant, l’éducation nationale, quelques ministres idéologues et surtout des illuminés se chargent de tout… en douce. Comment ? En faisant la peau au passé simple. Vous savez ce temps chéri de tous nos auteurs, de Voltaire à Hugo en passant par Molière, Proust, Flaubert, Céline, Racine, Maupassant… et tant d’autres. Ce passé simple symbolique qui se lisait dans des millions de lettres de poilus entre 1914 et 1918. Ce passé simple du terroir qui s'entendait dans les campagnes. Déjà que certains temps de la conjugaison comme le plus-que-parfait et le futur antérieur de l’indicatif ont été bannis, que dire du subjonctif et de tous ces temps qui ont été rasés dans la foulée et qui se sont inclinés tristement. Signes avant coureurs d’un passé simple déjà en danger ?

Pas besoin d’Halloween et de déguisements pour faire peur ! Au diable les costumes de revenants, fantômes, sorcières, vampires ou squelettes. Non. Sortir dans les rues et parler en passé simple est LE costume effrayant par excellence ! Essayez de parler et vous verrez les réactions : « Bien le Boniour Madame, comme Il fut chaleureux de votre part de me donner des bonbons ! Comme vous en parlâtes pendant plusieurs jours, sachez qu’Halloween est aussi l’occasion de vous dire : Des bonbons ou un sort ?". Si Halloween n'est pas une fête made in France... qu'elle soit au moins bien parlée ! À ce titre, l'association « Sauver les lettres » a montré qu'un enfant scolarisé aujourd'hui reçoit, rien qu'en primaire, 630 heures de français de moins qu'un enfant des années 1960. Presque deux ans !! Pourtant, à cette annonce, même ma petite fille s’est exclamée comme choquée : « C’est horrible ! On veut tuer le temps de la poésie ? C’est avec ce temps que tout devient poétique ». Et mon fils de s’exclamer comme une horrible prophétie  : « ils veulent enlever le passé simple ? Ils veulent enlever le passé simple ? Mais qui veut tuer le passé simple ? Et pourquoi pas tuer Pythagore alors ? ». Je le jure, c’est vrai ! L’école devient un sombre terreau où l’on cultive les maths à tout va- qui hélas ne donne rien de bon puisque le niveau s’écroule en France- et où l’on fait la peau comme pour se venger, à la grande dame du Français. Finies les grandes œuvres étudiées en classe : il faut du facile, ne pas décourager l’élève avec des livres trop compliqués, lui mettre sous les yeux des temps basiques et des phrases simples. Allez vous amuser à étudier « La Chanson de Roland », écrite en l'an mille, qui "rapporte des faits qui ont eu lieu deux siècles auparavant où le passé simple permet de fournir, même dans un récit au présent, un imparfait à l'intérieur du passé". Vous perdez une classe entière et les parents avec ! Même le correcteur orthographique de mon téléphone a du mal à accepter le passé simple dès qu’il l’aperçoit. Tapez : vîntes, vis, prîmes, crûtes, criions… » et vous verrez ! Des milliers de mots proposés plutôt que le passé simple… simplement. Pourtant, pourtant… Pourtant, tel est le temps par excellence du récit qui se distingue du passé composé, plutôt le temps de l’oral. Un trésor pour la littérature.

Las, le passé simple comme l'imparfait du subjonctif : (« Elise n'avait plus qu'à goûter les beignets avant qu'on les expédiât… », Céline, Voyage au bout de la nuit) paraissent des nuances trop compliquées pour des sociétés saisies de rapidité et dépourvues de précision.

Quelles seraient les conséquences d'une disparition totale du passé simple ? Dans l'usage comme dans l'apprentissage, cette perte coupe les générations à venir de leur histoire littéraire, en l'occurrence du plus grand trésor de littérature que constitue la littérature française. Le passé simple en étant ainsi mis au ban permet tristement à la langue française de devenir… comme les autres langues, plus simple et moins singulière. On apprenait la langue de Molière pour lire Rimbaud ou Proust, pas pour dire bouster, checker, liker… Le passé simple traîne une réputation de temps élitiste, bourgeois voire aristocratique.

Alors que le passé simple disparaît peu à peu des manuels scolaires et des romans, l'essayiste Alain Borer tire la sonnette d'alarme : « à force de ne paraître que dans l'écrit, le passé simple a quitté les zones frustes pour acquérir une sorte d'aura de salon, une valeur de classe huppée au fond tout à fait usurpée. Loin d'être une querelle de linguistes, la mort programmée de ce temps aura, selon le spécialiste d'Arthur Rimbaud, des conséquences dramatiques, dont la difficulté d'accès aux grands textes pour les plus jeunes ». Lol. Mdr. pourra-t-on lire très bientôt pour commenter un texte de Flaubert : « Il partit. Il voyagea. Il revint. »… si tant est que cette œuvre ait la chance d’être étudiée ! Quels sont ces simplets dépassés, du passé qui veulent assassiner, éradiquer, le passé simple ? On élimine le siècle des lumières dans la plus grande impunité.


Barbara Delaroche






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