Il n’y a pas si longtemps, on prenait sa plus belle plume pour écrire. Écrire un mot. Écrire une lettre. Écrire un article. Écrire un devoir. Le stylo à plume était alors le roi de tous les stylos. Le papier était son partenaire préféré sur lequel il pouvait s’adonner sans limite en bleu, vert, rouge, or… jusqu’à plus soif ou plutôt jusqu’à plus d’encre dans sa cartouche, bue par les mots écrits ! Ah la belle époque où l’on pouvait choisir… le crayon à papier pour les calculs de maths, le dessin ou les croquis. Le bic pour la prise de notes rapide. Et le stylo à plume… pour le grand numéro : le devoir sur table, les cours, les leçons, la poésie mais aussi plus largement les cartes d’anniversaire, les billets d’amour, les courriers officiels ou une carte de visite personnalisée… car la sensation procurée par le stylo plume est unique : un crépitement ressenti au bout des doigts avec la pointe en aluminium, plastique -ou luxe suprême - en or qui nous séduit toujours ! Écrire au stylo plume C’est une expérience à part. Qui peut commencer très tôt, et dès le plus jeune âge, lorsqu’il est le cadeau d’une communion, et se poursuit tout le long de le vie : cadeau d’un examen, cadeau d’un âge célébré , d’un anniversaire ou d’un événement particulier que l’on veut marquer à jamais. Car un stylo se garde souvent toute une vie. Comme un objet à part, témoin d’un moment que l’on n’oubliera jamais …
Car écrire au stylo plume demande et induit que l’on sache bien écrire .Non seulement l’écriture doit être fluide donc aguerrie (l’encre nous invite à maîtriser la langue et à ne plus faire de faute…même si l’effaceur demeure une béquille de secours) mais en plus l’esprit doit emmener cette plume loin très loin ! Oui écrire au stylo plume suppose que l’on est assez mature pour bien l’utiliser ! Et que dire des grandes plumes, personnalités, physiciens, aventurier, navigateurs et écrivains qui ont couché leur écrits, souvenirs, formules ou cartographie avec un stylo à plume !
Rappelons-nous, avant le stylo à plume il y avait l’encrier dans lequel on trempait la pointe du stylo et encore avant au tout début, il y avait la plume au sens premier du terme ! Sortie tout droit de poule et d’animaux … que d’avancée !
Lorsqua la l’école on avait le droit d’avoir un stylo plume dans nos trousses et l’on était autorisé à écrire en classe et à rendre nos devoirs avec le stylo plume.. c’était que nous étions des « grands » ! Je me rappelle la fierté et la magie de dévisser le stylo plume, avant de m’épancher sur mes copies. Je me rappelle aussi pas mal de fous rires en changeant les cartouches d’encre qui parfois au moment de s’enclencher dans le stylo, explosaient sur mon pull ou celui du voisin. Fou rire garantis.
Je me rappelle de mon premier stylo plume… Écrire au stylo plume c’est un peu accéder au rêve de s’apparenter aussi à un grand auteur… c’est en tous les cas l’image que je me faisais de ce stylo, l’outil clé d’un art... un peu comme la machine à écrire pour les journalistes d’antan ,qui tapaient sans relâche leurs articles passionnément !
Le stylo plume est culte. Un stylo bille ne se ressent pas de la même manière. Un stylo bille est pratique. Le stylo plume, c’est comme si vous aviez d’un coup au bout des doigts un trésor qu’il fallait savoir utiliser. Alors j’aime croire qu’en écrivant avec le stylo, on n’écrit pas comme avec un stylo bille ou un stylo à friction devenu le grand chouchou des collégiens. Effacer à tout va fait perdre un temps fou. Avec le stylo plume en main, c’est comme si on devait d’emblée donner le meilleur de nos mots et de notre esprit, dès la première fois ! Savoir écrire au stylo plume c’est se faire confiance et donner le meilleur de soi-même, de ses idées... mais si vous ramez, alors la perte de temps et la sentence sont immédiates : effacer l’encre puis devoir prendre un autre stylo pour écrire par-dessus est rébarbatif et source parfois de stress si le temps est compté !
Que d’évolution, que de richesses transmises depuis l’invention de l’écriture 3 000 avant Jésus-Christ ! Le premier stylo utilisé comme élément d'écriture fut la plume d'oie, d'où son nom. Des siècles plus tard, cette pointe a été traitée pour optimiser son utilisation avec le canal creux (rachis) qui retenait l'encre. Un système qui a inspiré le célèbre Waterman à innover et à faire partie de l'histoire du stylo. En 1827, l'inventeur Petrache Poenaru a breveté le stylo plume, développé à partir d'une grande plume de cygne. En 1850, le premier stylo avec un corps en caoutchouc dur et une encre fluide avec une plume en or a été fabriqué. Puis Duncan MacKinnon er Alonzo T.Cross ont inventé une variante du stylo plume en 1870 qui utilisait un fil dans un tube comme valve pour l'encre. Cependant, tous ces stylos étaient remplis d'une pipette. Tout a changé lorsque Lewis Waterman s'est rendu compte que les stylos plume de l'époque n'avaient aucun contrôle sur le débit d'encre, ce qui provoquait à son tour une fuite d'encre. En 1883, Waterman a amélioré le stylo plume existant avec un système de charge capillaire afin de ne pas renverser l'encre. Le stylo plume a été établi comme un produit d'écriture général, et depuis lors jusqu'à aujourd'hui, il a été utilisé pour écrire l'histoire. Une histoire hélas qui se meurt… Regardez les cahiers de nos grands-parents quand ils étaient enfants… un hymne à la calligraphie et à l’art d’écrire. Des lignes et des lignes parfaites de cahiers d’écoliers remplies et devenues presque des vestiges ! Et témoins d’une époque et d’une pédagogie qui a disparu. Oui nos grands-parents étaient des artistes !
Ainsi, je n’ai jamais oublié la belle écriture de ma bonne-maman (et des recettes de cuisine écrites au stylo à plume !) et j’ai offert des stylos plume à mes enfants. Je suis fière de les entendre dire - sans savoir la portée de leurs mots- « j’adore écrire avec mon stylo à plume ! ». Le pouvoir d’écrire, de fêter la richesse de la langue française, et de la mettre à l’honneur … pour lutter contre la culture des emojis, sms, claviers et autres subterfuges tactiles qui tuent toute forme d’art d’écrire et donc de réfléchir. Je n’aurais jamais pensé que cette plume aurait la valeur aujourd’hui d’une baguette magique qui nous offre un vrai pouvoir… celui d’écrire en liberté !
Barbara Delaroche
Barbara, vous avez écrit là une poésie.
Écrire au stylo plume est en réalité tout un art.
L’art de le manier nous fait chavirer.
C’est avec le stylo plume que l’on goutte aux vrais mots, à la langue.
Moi même l’utilise et c’est une fierté à chaque instant. Chaque lettre, chaque copie écrites au stylo plume est un trophée.
Merci Barbara pour ce bel article qui rend hommage à ce stylo que nous aimons tant. Vous le décrivez comme «sacré» et c’est là toute sa beauté.
Par ailleurs je remercie ma maman de m’en avoir offert un dès mon plus jeune âge pour aujourd’hui comprendre vos mots et la satisfaction de la plume.
Gardons le privilège de les utiliser car……